Paris – Maison de la culture du Japon
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Le Japon, au milieu du XIXe siècle, sous la menace des navires américains du commodore Perry, se vit contraint d'ouvrir trois ports aux navires occidentaux et signa en 1858 des traités commerciaux avec cinq pays, dont la France
Grâce à l'ouverture des ports de Nagasaki, de Shimoda et de Hakodate, les membres de la première ambassade française et les officiers des armées intervenantes en Chine en 1860, faisant escale au Japon, rapportèrent des livres, sujets de curiosité jusqu’alors inconnus, et nombre d'objets luxueux en usage au Japon à cette époque
Différents des exportations destinées à la Chine, ces objets beaucoup plus recherchés témoignaient de la vie raffinée des citadins à la fin de l'époque Edo
Les loisirs pratiqués auparavant par l'aristocratie furent imités à la fin du XIXe siècle par les populations urbaines qui appréciaient les objets luxueux, signes ostentatoires de leur réussite
Les réunions festives pour aller admirer les cerisiers en fleurs ou les érables rougeoyants en automne demandaient des accessoires pratiques mais élégants pour emporter les repas
Des boîtes en bois laqué dont les compartiments superposés renferment les mets s'accompagnent de flacons contenant du saké pour profiter au maximum de l'excursion...
...sans oublier de se munir aussi d'un ensemble portatif pour le plaisir d'après repas !
Les joutes poétiques au Japon, passe-temps favori des classes aisées, requéraient de posséder des écritoires, boîtes habituellement luxueuses, contenant pierre à encre et pinceaux, matériel nécessaire à la calligraphie
Les objets rapportés en France étaient généralement contemporains du temps des ambassades, quelquefois complétés par l'acquisition d'articles anciens comme ces splendides écritoires réalisés en maki-e, laque avec ajout de poudre d'or
Les Japonais entretenant une relation intimiste avec la nature, les décors de ces écritoires font appel le plus souvent à un répertoire végétal, motifs floraux, animaliers ou symboliques des saisons
Un goût prononcé pour l'asymétrie, pour les jeux contrastés avec le vide, rend l'ornementation de l'objet en plein accord avec sa fonction
Le thème des saisons reste toujours une inspiration constante des artistes, l'automne pétille sur l'écritoire au décor de jeunes cerfs, le frémissant buisson de lespédèzes emplit l'espace de ses couleurs ardentes
Sur un autre écritoire, une stylisation proche de l'abstraction, rend pourtant concrète l'entrée d'un jardin aux teintes de l'automne
Les voyageurs français furent aussi passionnés par les porcelaines qui n'étaient plus réservées à l'aristocratie mais devenues, à cette époque, en usage courant dans toutes les classes de la société
Mais si les décors de ces porcelaines correspondaient davantage au goût des Japonais, les Occidentaux marquaient une nette préférence pour les pièces luxueuses où les couleurs vibrantes de rouge se trouvent rehaussées abondamment d'or !
Les laques se démocratisant, cette matière va recouvrir de façon assez extravagante jusqu'à des supports en porcelaine
De la laque brune enrichie de rinceaux d'or laisse apparaître sur des petits bols des trouées de porcelaine bleu et blanc dont les dessins ne présentent aucune correspondance avec le décor laqué
Dans l'exposition, ces bols en porcelaine laquée étaient mentionnés comme "tasses avec soucoupes" ce qui m'a laissée dubitative ! mais qui correspond en définitive aux habitudes et à la présentation occidentales
Selon l'usage au Japon, et encore de nos jours, ces "tasses" et "soucoupes" s'apparentent plutôt à des bols à thé et à de très petites assiettes à gâteaux !
La joliesse, la minutie du travail et le fini des très petites pièces en ivoire n'ont cessé de fasciner les voyageurs occidentaux
Ceux-ci, recherchant avec passion ces miniatures dus à l'habileté des seuls artistes japonais, en ignoraient évidemment l'usage
Les Netsuke, sont en fait des objets utilitaires !
Un cordon passé dans deux trous prévus à cet effet permet de retenir l'Inrô, petite boîte à compartiments glissée dans la ceinture du kimono, l'empêchant ainsi de glisser
Ces objets, passés dans la ceinture accompagnaient souvent les blagues à tabac mais ne concernaient que la gent masculine !
A la fin du XIXe siècle, le kimono traditionnel fut remplacé par le costume à l’occidentale
Les Netsuke décoratifs ayant perdu leur usage, les voyageurs étrangers pouvaient ainsi se les procurer chez les brocanteurs
Les objets de culte bouddhique, n'étant pas destinés à l'exportation, mais en pratique sur le marché intérieur japonais, furent rapportés, écrivirent les voyageurs du temps, uniquement dans un but ethnologique !
Une expérience ethnologique...à la manière du XIXe siècle ! dans le prochain article
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Paris – Exposition « A l’aube du japonisme » – Maison de la culture du Japon
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