Heian Jingû – II –

Voyage de printemps à Kyôto

Japon – Printemps – Kyôto – Heian Jingû
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Visite du sanctuaire shintô Heian Jingû sous le signe du rouge vermillon !

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Les délicats cerisiers roses ont fort à faire pour tirer leur épingle du jeu !

Le sanctuaire Heian Jingû, édifié en 1895, est une réinterprétation moderne mais partielle du premier palais impérial construit à la fin du VIIIe siècle dans la nouvelle capitale d’alors, Heian Kyô, la capitale de la Paix ou plus justement la ville où réside le Tennô, l’empereur

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Au travers des piliers massifs de la grande porte

L’entrée du sanctuaire se franchit en passant sous une porte monumentale à deux étages dont les piliers laqués de rouge supportent un étage supérieur doté d’une balustrade

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Ôtenmon – La porte du ciel culmine à 19 mètres de hauteur
Trois passages surélevés par de grands degrés permettent l’entrée dans le  sanctuaire

L’architecture de la porte, empruntée au style bouddhique chinois de la dynastie Tang, serait une réplique de la porte sud de l’enceinte principale entourant l’ancien palais de Heian Kyô

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La corde Shimenawa suspendue sous la grande porte signale le caractère sacré de l’édifice

Les bâtiments du sanctuaire formant un quadrilatère, entourent la grande esplanade recouverte de sable blanc, symbole de pureté, reproduisent le style des pavillons de l’architecture Heian, constructions chargées de protéger aux quatre points cardinaux la résidence impériale des influences néfastes

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Sôryû rô – Le Dragon bleu veille sur l’Ouest du bâtiment…

Sur les côtés du sanctuaire, deux pavillons surmontent l’extrémité des ailes des bâtiments, en respectant les impératifs de construction associés aux forces cosmiques ou divines, comme les règles de géomancie, les couleurs et les nombres attachés aux constructions antiques

Ainsi l’Est est-il dévolu au Byakko le Tigre blanc quant l’Ouest se tient sous la protection de Sôryû le Dragon bleu

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Byakko rô – Le Tigre blanc veille sur l’Est

Le haut des pavillons est encore surplombé par le cumul des cinq composants terrestres symbolisant les quatre directions et le centre, constructions chargées de la protection dont s’entoure le souverain

Ces éléments combinent quatre couleurs, noir au Nord, rouge au Sud, bleu à l’Est et blanc à l’Ouest entourant le pavillon jaune, couleur du Tennô, au centre, tradition dont l’usage millénaire persiste encore dans le Japon contemporain

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Détail – Les cinq pavillons surmontant les toits

Les pavillons illustrent aussi les cinq éléments régissant l’Univers, le bois, le feu, la terre, le métal et l’eau, croyances d’origine chinoise et adoptées très tôt dans les pratiques du Shintô

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Pavillons symboliquement chargés de la protection impériale dans la capitale ancienne

Heian Jingû fut rebâti dans l’espoir d’approcher son modèle ancien mais comme aucun document ne subsistait des constructions primitives, l’architecte Itô Chûta s’inspira pour son projet de plans dessinés à l’époque Edo, dans cette période qui s’efforçait de retrouver la mémoire des modèles d’architectures antiques

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Daigokuden – Reproduction à une échelle réduite de la grande salle d’audiences du Palais ancien
Construit seulement en 1940, il sera incendié et finalement rebâti en 1979

Au Japon, au delà des restaurations nécessaires, les pratiques de reconstruction dans le style inchangé des formes anciennes sont une habitude courante depuis des siècles et contredisent évidemment la notion occidentale d’authenticité historique

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Ballet fascinant des lanternes de bronze  tout autour du corps des bâtiments

Itô Chûta, comme beaucoup d’architectes de la fin du XIXe siècle sublimait un passé mythique, en construisant ses édifices dans le style fascinant de Heian, époque considérée comme l’âge d’or de l’histoire japonaise

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Détail d’une lanterne de bronze

Ce style de construction, puisant dans un passé glorieux, affirmait ainsi la continuité dynastique de l’empereur Meiji qui restaura le pouvoir impérial en 1868, pouvoir confisqué trop longtemps par le gouvernement des Shôgun

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Somptueuses décorations en cuivre repoussé doré délimitant l’extrémité des balustrades devant les façades

Pour des raisons stratégiques, face à la pénétration dans la sphère asiatique des grandes puissances occidentales à la fin du XIXe siècle, le nouveau gouvernement s’attacha à promouvoir, notamment dans les arts, un élan nationaliste comme invention neuve d’une identité véritablement japonaise

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Complexité du système d’encorbellement et du chevronnage rayonnant au-dessus des premiers toits des bâtiments

Ce fut à l’occasion des célébrations marquant le 1100 ème anniversaire de la fondation de Heian Kyô que le nouveau pouvoir en place passa commande d’un édifice pour rappeler qu’à Kyôto, la présence impériale divinisée se succéda sans discontinuité

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Sur les toits, les acrotères Onigawara à figure de démon découragent d’autres déités plus pernicieuses !

Mais comme le financement alloué se révéla un peu juste ! les bâtiments ne furent construits que selon une échelle au 5/8 ème des dimensions primitivement envisagées

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L’habitude de laquer en rouge toute la structure du sanctuaire était originellement réservée aux temples bouddhistes, selon le style en vigueur en Chine
Elle fut appliquée aux sanctuaires Shinto à partir du VIIIe siècle puis tomba en désuétude
La tradition reprise à l’époque Meiji dure encore de nos jours

Les bâtiments servirent en cette année de 1895 à la tenue d’une quatrième « Exposition sur l’industrie nationale » destinée à encourager le pays sur la voie de la modernité

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Sur le site, une fontaine pour les ablutions pallie à l’absence de cours d’eau pour assurer la pureté du lieu

Les édifices, conçus originellement comme des bâtiments profanes, furent ensuite consacrés à la mémoire des deux empereurs ayant marqué l’histoire de Kyôto, Kanmu Tennô le fondateur de la capitale et Kômei Tennô, le dernier souverain ayant régné dans la ville avant la restauration de Meiji

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Shibi – Les poutres faîtières des toits s’ornent de Shibi, figure évoquant un animal fabuleux à l’origine incertaine mais chargé de protéger le bâtiment contre le feu

Le Heian Jingû est donc devenu un sanctuaire shintô important, et bien que relativement récent, lié à la Maison Impériale japonaise

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Les balustrades de bois délimitant l’espace sacré s’ornent d’embouts en cuivre doré

Comme pour de nombreux édifices construits entièrement en bois, le feu détruisit une grande partie des bâtiments en 1976, mais ils furent reconstruits trois ans plus tard grâce surtout aux dons de généreux donateurs

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Kawara – Les tuiles de couleur verte vernissées comme couverte des toits palatiaux

Ces bâtiments conçus originellement comme une réplique d’un palais en possèdent les toits recouverts de tuiles vertes vernissées contrairement à l’habitude de couvrir les sanctuaires Shintô d’écorces de cyprès ou encore de chaume pour les plus rustiques

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Murs blancs, balustrades rouges, fenêtres des façades grillagées, lanternes de bronze sont caractéristiques du style de construction de l’époque Heian

Les règles régissant les notions d’espace-temps restent incompatibles dans les cultures occidentales et japonaise car selon la logique historique de nos sociétés européennes, ces bâtiments reconstruits pour la dernière fois en 1979 d’après un schéma relativement récent ne peuvent être considérés comme authentiques et pourtant, ils figurent dans les manuels d’architecture japonaise comme un modèle incontesté du style de Heian !

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Omikuji – Des petits papiers divinatoires tirés au sort, dont le sanctuaire tire profit, sont ensuite pliés et accrochés habituellement aux branches d’un buisson
Ce jour là, ils briguaient à se faire passer pour des fleurs de cerisier !

En cette journée de printemps radieux, les cerisiers en pleine floraison …

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Shidarezakura – Les cerisiers au port languissant !

…débordaient de manière exubérante jusque sur les toits, ménageant un contraste de teintes fort plaisant avec le vert des tuiles vernissées

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Le jardin se manifeste de façon impromptue !

Juste derrière le sanctuaire les jardins ainsi annoncés par un printemps facétieux seront l’objet du prochain article

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Cachet rouge au nom du Heian Jingû
Provenant de notre Shuin chô, le carnet témoin des visites aux sanctuaires Shintô et autres temples

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Japon – Printemps 2014 – Kyôto – Heian Jingû :
I Heian Jingû – I –
IIHeian Jingû – II –
III Les jardins du Heian Jingû – III –
IV Autour de Heian Jingû – IV

8 réflexions sur « Heian Jingû – II – »

  1. Waouh! on reste bouche bée…
    Par ailleurs, il y aurait un débat à mener sur ce parti pris de reconstruction à l’identique au cours des siècles.Cette idée me plait assez par ce qu’elle suppose: un rapport au temps bien particulier.Je connais des gens que ça hérisse …
    Amitiés du matin
    Françoise

    • Ah ! Françoise, les partisans de l’authenticité à tout prix savent bien que rien de notre passé artistique ne nous ait parvenu intact !
      Notre-Dame de Paris, ruinée, aurait du être rasée sous la Restauration au profit d’une église néo-classique, elle a été sauvée grâce aux architectes du XIXe siècle … Sans Viollet-le-Duc et ses élèves, nos grandes cathédrales gothiques, nos abbayes romanes auraient disparu à jamais… Restaurations ou reconstructions ?
      Le débat, qui existe déjà, est problématique, restaurations en l’état certes, mais quel état ? et de quelle époque ? La plupart des restaurations sont des reconstructions d’après documents… Bien sûr il y a Pierrefonds, Carcassonne, le cloître des Jacobins à Toulouse, etc…Innombrables témoins d’un patrimoine reconstruit qui passent pourtant pour authentiques !

      Au Japon, en l’absence de l’utilisation de la pierre de taille, tous les édifices, sacrés ou profanes, sont construits uniquement en bois avec la conséquence d’être régulièrement la proie des incendies…D’où reconstructions perpétuelles au cours des siècles selon le style initial, ainsi on rebâti toujours un temple au XXIème siècle dans le style du XIIème
      Heian Jingu est une exception ! Il devait être détruit après les cérémonies et festivités de 1895, mais le symbole qu’il représentait était trop fort à une époque où le Japon avait besoin d’affirmer une légitimité incontestable… pour se faire bientôt le gendarme de l’extrême Asie…Mais c’est une autre histoire !

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